Peu après avoir achevé l'écriture du troisième 'Pirates of the Caribbean', Hans Zimmer a déclaré 'I'm done with pirates!'. Que s'est-il passé ensuite, nul ne le sait. Toujours est-il que 4 ans plus tard, Monsieur Zimmer se retrouve à la tête du dernier enfant de la saga. En partant du constat suivant: impossible de faire mieux que 'Pirates of the Caribbean: At World's End', la seule solution viable était de changer de cap. Abandonnant la magie, le mystère et l'émotion du dernier film, le compositeur affiche clairement un retour aux sources dont les maîtres mots sont: action, fun et exotisme.
Pour cela, il a fait appel au duo de guitaristes mexicains Rodrigo y Gabriela, qui font un petit carton sur la scène internationale. Leur jeu agressif et virtuose se marie aux anciens thèmes, offrant un côté latino au film, dont une partie semble se dérouler au large de l'Espagne. L'album se trouve donc ponctué de morceaux guitares-synthé sympathiques entraînants et décalés, mais parfois longuets ('South Of Heaven's Chanting Mermaids'), qui proposent de nouvelles mélodies ('Angelica') autant qu'ils revisitent les anciens thèmes ('The Pirate That Should Not Be', 'Angry and Dead Again'). Petite incompréhension cependant: aucune de ces pistes n'est incluse dans le film, hormis 1 minute extraite d''Angelica'.
A côté de cette surprise restent évidemment de solides morceaux estampillés Zimmer, mélanges de synthés et d'orchestre sur des rythmes déchaînés. Là, on observe avant tout une utilisation massive des thèmes des deux premiers films (provenant essentiellement des morceaux 'Jack Sparrow', 'The Black Pearl', 'To The Pirate's Cave', 'He's A Pirate'). Une petite déception peut-être, au vu de la diversité thématique que Zimmer avait offerte aux bandes originales de 'Dead Man's Chest' et 'At World's End'. Autant le niveau de précision des deux précédentes bandes originales était poussé, autant ici on sent un certain relâchement, à mettre peut-être sur le compte d'une certaine volonté de 'retour aux sources'...
Il n'y a cependant pas trop à se plaindre: les thèmes réutilisés sont présentés avec inventivité, sur de nouveaux rythmes et pourvus d'une nouvelle orchestration, dont les guitares de Rodrigo y Gabriela ('Palm Tree Escape'). Au rayon nouveautés: 'Blackbeard', nouveau thème très impressionnant, sinistre et malsain qui fait des étincelles, et 'Mermaids', piste chorale qui débute sur un motif tiré du 3ème film, avant de révéler sa nature terrifiante et sa force émotionnelle. Après 5 minutes, la piste retrouve avec férocité le thème de 'Blackbeard' - un moment de pur bonheur.
Mais l'ensemble reste une très grosse production, qui manque singulièrement de personnalité. Si on la compare à d'anciens morceaux comme 'The Kraken', 'Davy Jones', 'Dinner Is Served' ou 'Up Is Down', qui possédaient chacun leur caractère propre, on a l'impression qu'ici ne subsiste qu'une suite de thèmes réjouissants et vigoureux, mais sans âme. C'est beau, propre et ça sonne admirablement bien, mais ce n'est plus aussi surprenant et travaillé que les deux précédents opus. Comme si les compositions précédentes avaient toutes été mélangées, perdant leur sens original.
Ainsi, la reprise de 'I Don't Think Now's The Best Time' (plus précisément la scène de la mort de Lord Cutler Becket, dans le 3ème film), qu'on peut entendre à la fin de 'Mermaids', ne fait que détériorer un thème inoubliable, en résumant honteusement 4 minutes en 30 secondes. Il en va de même pour l'extrait de 'A Family Affair', repris tout à la fin de 'Blackbeard'. Une mélodie qui s'inscrivait dans la continuité d'une superbe piste, se retrouve ici accolée à la fin d'un morceau sans rapport aucun.
On peut donc regretter le côté 'fourre-tout' de l'album, où divers petits morceaux ont été collés les uns aux autres sans réelle homogénéité. Mais surtout, comme bien souvent chez Disney, on n'a droit qu'à un album très court (soit 30 minutes de compositions originales, sur les 2h20 du film...). Connaissant le potentiel des thèmes de la saga et le rôle primordial de la musique dans ces films, on reste sur un sentiment d'inachevé. Renforcé par la présence de 7 remixes tout à fait dispensables en fin de disque.