Tolkien

UN NEWMAN POUR LES GOUVERNER TOUS !!

Loin des cuivres pétaradants de Howard Shore sur la Trilogie Le Seigneur des Anneaux et Le Hobbit, la partition de Thomas Newman pour le biopic sur l’écrivain britannique John Ronald Reuel Tolkien apporte un contraste musical radical. Une approche pleinement justifiée par la finalité du long-métrage de Dome Karukoski qui ne cherche pas à rendre hommage aux œuvres éponymes ayant fait la renommée de l’auteur ni aux films de Peter Jackson, mais bien à la vie de J. R. R. Tolkien. Certains regretteront sans doute que les mélodies de Shore ne soient pas citées et que la partition de Newman ne détonne pas plus… Mais comme à son habitude, le compositeur cible l’aspect dramatique du film pour nous livrer un écrin musical des plus somptueux.

Tolkien relate l’ensemble des évènements plus ou moins dramatiques ayant forgés le personnage interprété par Nicholas Hoult. Ce biopic se focalise tout particulièrement sur trois piliers fondamentaux de l’être humain - l’amitié, l’amour et la création - que le compositeur Thomas Newman se charge de mettre en exergue dans sa partition. La pureté de son love theme (‘Lúthien Tinúviel’ ‘The Ascanius’) nous hante lorsque Tolkien embrasse Edith dans les coulisses d’un théâtre/au départ de la Grande Guerre ; tandis que son thème principal (‘Helheimr’) retentit lorsqu’une « communauté » de jeunes artistes, animés d’un esprit créatif, se soude avec la création du TCBS (Tea Club, Barrovian Society). D’un autre côté, Newman injecte un côté plus mystérieux à son score lorsque l’on rentre dans l’imaginaire de Tolkien (‘Dragons’, ‘Army of the Dead’, ‘Black Rider’, ‘Eik’) ou lorsque celui-ci fait part de ses créations à son entourage (‘Vinátta (Friendship)’, ‘Geoffrey’) ; et ce notamment par l’emploi de voix célestes. L’ombre de la Première Guerre Mondiale plane aussi sur tout le film et c’est un Tolkien alité et envahit par la peine que l’on découvre retranché à la frontière d’un No Man’s Land. Newman met en évidence cette solitude à laquelle il est confronté dans les tranchées (‘Dragons’,‘The Great War’, ‘Army of the Dead’). La mort de la plupart des membres du TCBS l’ayant ravagé (‘Scuppered’, ‘Dark Magic’), il réalise que l’amitié ; qui a été l’épicentre de sa vie, doit nécessairement figurer au cœur de ses romans. La piste ‘Fellowship’ ; très judicieusement nommée (puisqu’elle signifie communauté, camaraderie, confrérie) fait donc la transition entre sa jeunesse et son passage à l’âge adulte, ainsi qu’à l’écriture de son tout premier livre. A la fois nostalgique, mélancolique et lumineuse, elle clôture le film de manière subliminale !

Il y a comme un pouvoir réconfortant dans la musique de Thomas Newman ; que l’on caractérise immédiatement par son piano harmonieux (‘Fellowship’, ‘Dutch Courage’, ‘Sunlit’, ‘Dark Magic’), son hautbois vibrant (‘John Ronald’), ses traits de cordes poignants (‘Felowship’, ‘Helheimr’) et ses chœurs élégiaques (‘Fellowship’). Sélectionné par le cinéaste pour son style « éthéré et mystérieux », Le compositeur est resté fidèle à lui-même tout en célébrant à la perfection la vie de cet auteur légendaire avec une formule musicale inchangée qui capte à la perfection le récit de cette histoire lacrymogène. Aussi minimaliste soit-elle, la BO de Tolkien s'est imposée comme l’une des meilleures de 2019 !!