The Elder Scrolls V: Skyrim

Il existe des œuvres marquantes. Des compositions qui frappent, émeuvent, motivent, interpellent. Skyrim, c'est un peu tout ça à la fois.

Jeremy Soule est un habitué de la série des Elder Scrolls. Il a composé la musique de Morrowind, Oblivion, et de façon plus générale officie dans le domaine des musiques de jeux vidéos depuis si longtemps qu'il apparaît pour certains comme le meilleur contributeur du genre (sans parler de la récente controverse lors d'un classement le qualifiant selon les fans comme 'supérieur à Beethoven').
Sans être minimalistes, les BO des Elder Scrolls précédents étaient courtes. Très courtes. Pour des jeux dépassant les 300 heures (objectives) de durée de vie, 40 minutes c'était franchement redondant. Pour Skyrim, rien à voir, puisqu'on a accès à 3 CD, soit 180 minutes. Rien que ça. On notera cela dit la présence de musiques déjà entendues dans les précédents Elder Scrolls (de Morrowind surtout, comme 'The Jerall Mountains') mais légèrement réorchestrées.
Certains joueurs n'apprécient pas de 'subir' une musique en permanence et la coupent pour s'immerger complètement, surtout dans ce genre très immersif qu'est le RPG. C'est à la fois intéressant et vrai, tout en étant très triste quant au travail et la qualité de la composition.

Il est impossible de faire un commentaire de tout l'album, j'en resterai à quelques notions générales et affects personnels.
A noter que pour les amateurs de relaxation ou de musiques d'ambiance, le CD 4 rassemble des bruitages de l'univers (cascades, nature, etc). Les passionnés de jeux de rôle apprécieront sûrement.

D'abord le thème, 'Dragonborn'. Il est, je crois, tout à fait descriptif du travail accompli. On retrouve le thème principal des Elder Scrolls, avec sa variation habituelle (la version d'Oblivion avait la noblesse de la royauté que l'on côtoyait dans le jeu). La musique se met en retrait d'un chœur de voix puissantes, chantant un poème épique issu du jeu et traduit en langue des dragons pour l'occasion. Le mélange de voix est sublime, puissant, tout est équilibré parfaitement. Moi qui écoute d'habitude la musique à un niveau assez bas pour éviter la saturation de mon attention, j'apprécie de mettre le son un soupçon trop fort, juste pour sentir le flot musical. Sensations garanties. A noter que ce thème est réutilisé occasionnellement (et non systématiquement, ce qui est très appréciable) dans 'One They Fear' par exemple.

La musique la plus susceptible d'être entendue en jeu s'appelle 'From Past To Present'. C'est pratiquement un sous-thème centré sur Bordeciel. La première fois qu'on l'entend, c'est à l'instant précis où le jeu nous laisse la liberté totale. De la neige, un grand paysage, de la vie, et cette musique. Magnifique. Musicalement elle est très douce, avec des voix très cristallines. A mon sens elle fait partie des plus belles musiques jamais écrites.

De façon générale, Jeremy Soule compose ici de très nombreuses chansons, pour de nombreux contextes, une myriade de musiques sans thèmes, juste l'influence vocale propre à Bordeciel, et par petites touches des cordes légèrement vibrantes qui ne sont pas sans rappeler d'autres compositions de medieval fantasy comme Conan Le Barbare, Le Seigneur Des Anneaux ou ultérieurement A Game Of Thrones.
Une musique symphonique tour à tour douce, épique, noble ('Imperial Throne', 'Dragonsreach'), ambiante ('Silent Footsteps'), et même ça et là un morceau d'ambiance de taverne ('A Winter's Tale').
La flûte, la harpe viennent de temps à autre apporter de la douceur ('Secunda') et l'orchestre symphonique se met en retrait pour laisser apprécier l'effet.

C'est complet, tout simplement. Évidemment toutes les chansons ne laissent pas un souvenir impérissable, surtout celles qui sont ambiantes ('Into Darkness', 'Masser', 'Night Without Stars'), et à tout écouter d'une traite on aura l'impression (relativement fausse) de redites, car c'est toujours la même ambiance nordique qui s'exprime, mais c'est une bande originale qui s'écoute, même sans image, juste pour la beauté du travail. C'est comme un voyage, une plongée dans un univers vaste, où la nature et la magie ont encore le pas sur l'humain.
Je ne peux que vous encourager à écouter ce triple album, car si beaucoup connaissent désormais le thème 'Dragonborn', n'en rester qu'à cela constitue une erreur manifeste.

Une des meilleures BO jamais éditées, à mon sens, a fortiori dans le genre de la fantasy.