Elmer Gantry

Intéressé par le roman à succès de Sinclair Lewis, les producteurs des studios ‘United Artists’ décidèrent de porter à l’écran ‘Elmer Gantry’ (fr : Elmer Gantry le charlatan) et chargèrent Richard Brooks de sa réalisation.

L'histoire se déroule durant la prohibition, et c'est avec pour toile de fond le mouvement revivaliste américain, très actif aux États-Unis dans l'entre-deux-guerres, qu’Elmer Gantry (Burt Lancaster), un représentant de commerce, tente d’exercer son métier. Étant aussi très religieux, il fait la rencontre de sœur ‘Sharon Falkoner’ (Jean Simmons) dans une réunion évangélique et en tombe amoureux. Alors qu'il s'est lancé dans une croisade contre les bars clandestins, la drogue et les maisons closes, une prostituée croise sa route et le reconnait...

Le film a rapidement remporté un grand succès, tant auprès des critiques que du public. En incarnant le personnage très controversé de ‘Gantry’, Burt Lancaster a remporté un Oscar ainsi que le Golden Globe du meilleur acteur. Jean Simmons a été magique dans le rôle de Sœur ‘Sharon Falconer’, et la douce ingénue Shirley Jones a stupéfié tout le monde avec sa performance fantastique dans le rôle de ‘Lulu’, l'ancienne amante de ‘Gantry’, dont elle a également remporté un Oscar. De plus, ce film a également reçu une autre nomination pour la meilleure musique (1).

Fort de son succès avec des composition comme ‘Bad Day at Black Rock’ (fr : Un homme est passé) en 1954 ou encore ‘Invitation to the Dance’ (fr : Invitation à la dance), deux ans plus tard, c’est André Prévin qui fut engagé pour composer la musique de ce film.

Sa partition semble être l’ajout d’un personnage supplémentaire pour le film. Elle est étonnamment courte, mais elle informe le spectateur à chaque fois qu'elle est utilisée. Basé sur l’édition 33 tours original, voyons à présent quelques séquences en détail :

Le ‘Main Title’ (A1) est l'un des lancements de scène les plus propulsifs de l'histoire de la musique de film, une étonnante pièce maîtresse virtuose qui plante le décor à la perfection.

‘Lulu's Room’ (A4) est une valse joliment attachante jouée par un grand orchestre.

‘Do You Believe’ (A5), nous fait entendre un grand roulement de cuivres, cher au compositeur newyorkais William Schuman dans les années 1940 et 1950, alternant avec des chuchotements de cordes dignes d'une maison hantée.

‘Not As My Lover’ (A6), est semblable à une promenade en calèche qui descend peu à peu vers la morosité.

‘Kiss Me Goodbye’ (B3), commence tendrement en passant par une légère pointe de jazz pour revenir à une tendresse affectueuse et à un solo de violon semblable à du Rozsa. Prévin nous la fait réapparaître dans la séquence ‘Elmer and Lulu’. Cette piste situé en (B5) présente une vulnérabilité authentique que Previn avait manifestement déjà entendu dans la composition de Hugo Friedhofer pour ‘The Best Years of Our Lives’ (fr : Les meilleures années de notre vie), sorti en 1946.

Enfin, Prévin conclu la finale avec ‘End Title’ (B7) où des cordes résolues apparaissent dans le titre de fin, ainsi qu'un rappel de l'ouverture violente et tendue du titre principal… C’est très efficace !

Paru lors de la sortie du film, le label UA a préféré souligné le travail d’André Prévin, en éclipsant les nombreux chants religieux qui apparaissent dans le film, ce qui au final n’est pas plus mal (2).

Dans une carrière remplie de partitions brillantes, on ne peut qu'admettre que 'Elmer Gantry' reste un point culminant dans la prodigieuse carrière du compositeur. C’est donc une partition que je conseille à tous.

(1) Bien que le prix ait été décerné à ‘Exodus’, la partition de Previn s'est imposée parmi les musiques de films de cette année-là.
(2) Des rééditions CD offre des bonus supplémentaires en ajoutant ces chants religieux.

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